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Le blues des fêtes de fin d’année : comment y faire face ? 

— Publié le 15 décembre 2023

Le blues des fêtes de fin d’année : comment y faire face ? 

Dans l’inconscient collectif, les fêtes de fin d’année sont un moment joyeux que tout le monde attend avec impatience. Pourtant, pour de nombreuses personnes, notamment les plus âgées, la période est marquée par une solitude douloureuse ou des souvenirs difficiles. Véronique Cayado, Docteure en psychologie spécialiste du vieillissement, décrypte pour nous le « blues de fin d’année » et nous donne des pistes pour y faire face.

Les fêtes de fin d’année, porteuses d’une symbolique chargée 

Si les fêtes de fin d’année sont particulièrement dures à traverser pour certaines personnes, c’est parce qu’elles sont lourdes de sens. Traditionnellement, elles riment avec réunion autour d’une table bien garnie, échanges de cadeaux auprès du feu ou encore présentation émouvante des nouveaux venus (compagnons, enfants, petits-enfants…) au reste de la famille. La publicité, les films, la littérature… entretiennent ces représentations idylliques. Bref, il est difficile d’y échapper. Pourtant, dans de nombreux cas, la réalité est tout autre. Dans beaucoup de familles, les relations sont houleuses au point que certains membres décident de faire l’impasse sur les fêtes de fin d’année.

Distance géographique, problèmes d’emploi du temps entre la famille et la belle-famille, conflits entre frères et sœurs, divergences éducatives, rejet d’une orientation sexuelle… Autant de paramètres qui viennent perturber les réveillons. En outre, même quand toute la famille se réunit, les fêtes ne sont pas toujours un moment heureux. Par exemple, après le décès d’un proche, difficile de fêter Noël sans avoir le cœur lourd. On se force à maintenir un semblant de normalité pour faire plaisir aux plus jeunes. Pourtant, le cœur n’y est pas. N’oublions pas non plus les personnes hospitalisées, pour qui ce moment revêt un goût amer. Enfin, avec la conjoncture économique difficile, de nombreuses personnes n’ont plus les moyens de retrouver leurs proches, ni d’offrir des cadeaux de Noël ou de se préparer un bon repas.

Vous l’aurez compris : il y a mille et une raisons de nuancer la « perfection » supposée des fêtes de fin d’année. On a beau le savoir, il reste difficile de ne pas se sentir triste à l’approche d’un Noël que l’on considère d’avance comme « raté ». Passer seul les fêtes de fin d’année, par choix ou par contrainte, n’est pas toujours facile. 

Ne passez plus à côté des conseils de nos experts !

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    Pour Véronique Cayado : « C’est un des paradoxes de notre société, où l’on valorise le fait d’être autonome et indépendant. Savoir affirmer son individualité et ses choix au sein des groupes est une compétence remarquable et remarquée. Et parallèlement à cela, il existe une forme d’injonction au lien social, à devoir s’inscrire dans de multiples réseaux de sociabilité. Autant dire que quand nos conditions physiques et sociales d’existence ne nous permettent plus, ou pas, de répondre à ces exigences en menant une vie à la fois indépendante et socialement riche, on apparaît vite comme le vilain petit canard qui n’est pas à la bonne place. »

    La psychologue poursuit : « Cette pression peut venir des autres, mais pas forcément, parce qu’on a intériorisé ces normes sociales. On se juge soi-même au regard de ces normes, même si on n’y adhère pas forcément ou que l’on voudrait s’en détacher. Cela peut générer une baisse de l’estime de soi. ». Par ailleurs, elle souligne que cette injonction au lien social ne s’adresse pas à tous de la même manière. Ainsi, « on va avoir tendance à considérer comme “plus normal” qu’une vieille personne soit seule, y compris pendant les fêtes. C’est un peu comme si cela allait dans le sens de la vie et des besoins humains. Bien évidemment ces fausses croyances favorisent l’isolement et les solitudes des anciens. »  

    Comment aborder le « blues des fêtes de fin d’année » ? 

    Si pour certains, la solitude lors des fêtes est choisie, pour d’autres, elle est plus difficile à supporter. Aussi, pour mieux vivre les fêtes de fin d’année, de plus en plus de personnes décident de les réinventer et d’en changer la symbolique.

    Par exemple, beaucoup de jeunes les passent désormais entre amis. Ils ne se forcent plus à fréquenter une réunion de famille qui ne les rendrait pas heureux. De même, si vous passez Noël ou le nouvel an seul avec votre conjoint, pourquoi ne pas en profiter pour faire une sortie au restaurant, ou même une escapade romantique loin de chez vous ? Nul besoin de se forcer à maintenir les codes de Noël (grand repas à la maison, échange de cadeaux) si vous n’en ressentez pas l’envie. D’autres personnes décident même de faire de Noël un jour tout à fait ordinaire, se détachant de la pression sociale. Si vous avez envie d’une simple soirée TV devant un bon repas, écoutez-vous ! 

    Si vous souffrez de solitude lors des fêtes de fin d’année, vous avez aussi la possibilité de vous investir dans une association organisant un repas de Noël pour les personnes sans domicile fixe. Vous pourriez, par exemple, participer à la préparation des plats ou au service. C’est l’occasion de s’entourer et de trouver un rôle et un sentiment d’utilité. Votre santé ne vous permet pas d’être bénévole ? Vous pouvez peut-être bénéficier d’un événement en faveur des personnes âgées organisé près de chez vous. N’hésitez pas à vous renseigner auprès de votre mairie pour en savoir plus.

    Enfin, n’ayez pas peur de vous manifester auprès de vos proches ou de vos voisins. Comme mentionné plus haut, être seul pendant les fêtes peut arriver à tout le monde au cours de la vie. Il y a de grandes chances que vos proches aient vécu cette situation et fassent en sorte que vous passiez les fêtes entouré.

    Accueillir ses émotions telles qu’elles sont

    Enfin, cela peut paraître paradoxal, mais le blues de fin d’année ne doit pas forcément être surmonté ou réprimé. Si ce Noël ou Nouvel an est marqué par un deuil, vous n’avez pas à masquer vos émotions. N’hésitez pas à saisir ce moment privilégié, en compagnie de vos proches, pour évoquer la personne disparue. Même si des enfants sont présents, ils peuvent tout à fait comprendre vos émotions. D’autant plus si vous les expliquez avec des mots simples. Il s’agit même d’un témoignage de sincérité très précieux pour leur développement.

    Comme l’explique Véronique Cayado, « On a le droit d’être triste et d’aller vers les autres sans cacher son émotion. Ce n’est pas une maladie contagieuse ou honteuse qui n’aurait pas sa place dans ces moments festifs. Le premier Noël sans celle ou celui qui partageait notre vie, la nouvelle année qui commence sans elle, sans lui… Ce sont là autant de premières fois douloureuses que l’on voudrait ne pas avoir à vivre. Notamment cette impression d’étrangeté et de décalage que l’on peut ressentir avec le reste du monde. Rester seul avec son manque et sa douleur peut être nécessaire pour certains. C’est une manière de rester avec son proche disparu. Parfois, on ne s’autorise pas (encore) à vivre ces moments-là sans lui. Pour d’autres, au contraire, il y a comme une urgence à être avec ceux qui comptent, être là dans le moment présent avec eux. »

    Mais alors, comment l’entourage doit-il aborder cette situation ? La psychologue poursuit : « Ce qui, forcément, peut être plus compliqué, c’est l’adéquation de l’entourage aux besoins de la personne endeuillée. Soit parce que les proches vont chercher à tout prix à la sortir de sa torpeur. Soit au contraire, parce qu’ils vont la ramener sans cesse à cette perte. Ce n’est pas forcément évident de part et d’autre. On se pose des questions du type “est-ce que je dois faire comme si de rien n’était ? est-ce que je peux parler de ça avec lui ?”. Même quand on partage la même perte, on ne sait pas trop comment faire, comment se parler. Cela étant, quand l’émotion est exprimée, il est généralement plus facile de l’accueillir et d’échanger. »   

    La solitude des personnes âgées pendant les fêtes 

    Au-delà des situations mentionnées précédemment, beaucoup de personnes sont amenées à passer les fêtes de fin d’année seules. D’après un sondage IFOP pour l’association Dons solidaires, elles représentaient 14 % de la population en 2022. Les personnes âgées sont particulièrement concernées : en 2021, on estimait que 2 millions de personnes âgées étaient isolées des cercles familiaux et amicaux, sans compter 530 000 aînés qui étaient en situation de mort sociale, c’est-à-dire sans aucun contact avec l’extérieur. Conflits familiaux, veuvage, décès des proches au fil des ans, éloignement géographique… sont autant de facteurs pouvant expliquer cette solitude. 

    Pour alerter sur l’isolement des personnes âgées, l’association Les Petits Frères des Pauvres s’appuie sur la symbolique des fêtes de fin d’année pour élaborer chaque année des campagnes émouvantes, comme cette campagne de sensibilisation à l’isolement des aînés lancée en 2023.

    Si vous connaissez des personnes âgées isolées, pensez à prendre de leurs nouvelles en cette période particulière. Même si vous ne pouvez pas les convier chez vous, un simple appel ou une visite leur feront certainement du bien. Pour vous aider à faire le premier pas, les Petits frères des pauvres ont d’ailleurs créé le kit du Chasseur de solitude à commander ou télécharger gratuitement.

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