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Le portrait du mois : Claude Guillaume de Mayo

— Publié le 1 février 2019

Le portrait du mois : Claude Guillaume de Mayo

Une personne ordinaire dont la vie est extraordinaire !

Silver Alliance dévoile pour la toute première fois le portrait, le parcours remarquable et la longévité exceptionnelle d’une femme, Claude Guillaume de Mayo. Une personne ordinaire dont la vie, vous le découvrirez, est extraordinaire. Ce sont ces personnes au parcours hors du commun que Silver Alliance va mettre en avant chaque mois dans un article. Le but : ne jamais oublier que la construction du nouveau monde nécessite de respecter l’ancien monde et de l’intégrer.

L’instinct d’une battante

Petite-fille de polytechnicien, fille d’un ingénieur du secteur naval, elle épouse un Centralien de la promo 1920 qu’elle a rencontré à travers son activité de vol à voile. Tiré par une corde de 800 mètres, propulsé dans les airs entre 10 et 20 mètres de hauteur, le planeur dans lequel se trouvait Claude (en pantalon et non en robe à cette époque !) lui a sûrement inspiré le goût du risque qui a toujours épicé sa vie.

Diplômée de l’École Centrale Paris en 1936, dans une promo ne comptant que deux femmes, Claude garde le souvenir de ses cours d’aviation, de chemin de fer, de physique et mathématiques appliqués.

Souvent cantonnée à la place de numéro deux dans les entreprises dans lesquelles elle a exercé, parce qu’elle était une femme, Claude a développé une résilience à toute épreuve et a contribué modestement à l’amélioration du statut de la femme. Avec son nom de jeune fille, Claude Guillaume, à une époque où les curriculums vitae ne comportaient pas de photo, elle a surpris plusieurs PDG et responsables en arrivant dans leur bureau pour briguer un poste ou diriger un chantier. Quelle ne fut pas la surprise des gardiens d’un phare breton en la voyant débarquer pour réparer un transistor ! Ils ont été obligés de demander une autorisation préfectorale pour lui permettre de rentrer dans le phare, parce qu’elle était… une femme.

Femme entrepreneur au caractère affirmé, elle a créé plusieurs sociétés, notamment dans les cosmétiques. Pendant la Seconde Guerre mondiale, avec l’aide des pharmaciens marseillais qui l’approvisionnaient en matières premières, cette chimiste hors-pair a élaboré des produits de beauté qu’elle a commercialisés.

Un optimiste à toute épreuve

À 104 ans, elle avait encore des rêves plein les yeux, et pourquoi pas celui de voir les terriens coloniser une autre planète : la conquête spatiale était, pour elle, le plus grand et le plus fascinant des défis technologiques à relever.

Quand on lui a demandé si le monde actuel l’inquiétait, elle a répondu très calmement : « À quoi cela sert-il de s’inquiéter ? » Le réchauffement climatique qui nous préoccupe aujourd’hui ne devrait pas être traité de manière aussi catastrophée, « s’il fait trop chaud, nous retournerons vivre sous terre », disait-elle. Elle nous a même donné son avis sur le nouveau président de la République : « C’est une bonne chose d’avoir un président jeune, qui bouscule le monde politique traditionnel, pour relever les défis à venir. »

Les minutes passaient au cours de notre entretien et Claude finit par nous parler des secrets pour atteindre cet âge très honorable. Pour elle, bien vieillir c’était avant tout une motivation, une détermination, une capacité à ne pas rester dans une zone de confort, à se réinventer, se projeter, à concevoir des projets et à se donner des objectifs.

Bien vieillir, ça ne se commande pas, ou tout du moins Claude nous a confié qu’elle a profité de la vie : manger mais sans trop d’abus, fumer sans trop d’excès et parfois prendre une petite « cuite ».

Bien vieillir, c’est garder sa tête, être curieux sur tout et de tout. Se mettre à la page, ce qui semble simple pour cette écrivaine qui a terminé un 27e ouvrage avant de nous quitter en début d’année 2018.

Elle se souvenait avoir commencé à utiliser un ordinateur en enfilant des chaussures de sécurité, une charlotte, une combinaison, puis être entrée dans une pièce de 30 m² : la taille d’un ordinateur il y a soixante ans. Aujourd’hui elle a son compte Facebook, gère les commandes de ses livres sur Internet, réalise des vidéos diffusées sur YouTube et n’hésite pas à utiliser Skype pour parler au reste du monde. Elle est impatiente d’utiliser des robots, la domotique dans son quotidien, pour lui permettre de réaliser les tâches pénibles de ses activités.

Claude dessinait toujours avant son départ, même si ses mains lui faisaient de plus en plus mal. Elle continuait à écrire le petit journal de la promo 36 en y mettant les souvenirs des années passées, notamment des professeurs de sa promo et leurs particularités, même si les lecteurs étaient devenus les fils et petits-fils de ses camarades tous disparus. Et elle ne disait jamais non quand on lui offrait des chocolats, noirs de préférence.

La gourmandise n’est-elle pas un des plus beaux défauts de la vieillesse ?

L’histoire de Claude Guillaume est vraie et construite sur un entretien que Benjamin Zimmer a eu avec elle à son domicile en 2017. L’intégralité de son témoignage est parue dans la revue Centraliens n°658, mars-avril 2018. Ce document a été publié dans le Hors-série : « Silver Économie : tirer un avantage concurrentiel de la transition démographique, c’est possible ? », édité en novembre 2018.

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